Au pays de la solitude


L'obscurité grandissante
Jean-Charles PAILLET

y

L’obscurité grandissante
accentue ta solitude
les battements de ton cœur
t’effraient d’autant plus


Tu n’es pas pour autant
plus serein dans la lumière
si aucun rivage ne te retient
pas même une main
pas même des lèvres


© Jean-Charles PAILLET
Illustration : encre de Chine sur galet © Jean-Charles PAILLET

Jean-Charles Paillet
Jean-Charles Paillet est animé par l’instant présent et les belles valeurs qui élèvent le coeur et l’âme... Sa poésie se retrouve dans ses dessins, ses photographies et ses chansons. Sa rencontre avec Yves Broussard est un tournant dans sa vie de poète.
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Solitude acceptée
Mokhtar EL AMRAOUI

y

La solitude est notre inexorable destin
Des langes au linceul l'on naît et meurt seuls
Pourtant nous traversons notre vie tout fiers
Croyant être dans une foule solidaire
Oubliant illusoirement que l'on est solitaire 

Les mains d'aide crues tendues nous lâchent
Ne répondant pas hélas à nos vains appels
Tombés hébétés dans des échos perdus
On les accuse de traîtrise et l'on se fâche

Mais à cette amère vérité l'on s'habitue
Et l'on apprend à ne plus s'en faire 
N'y voyant plus un tragique enfer
L'on s'aguerrit y trouvant de bonnes raisons
Taisant notre colère pour d'autres horizons 

L'on pardonne ces égoïstes errances par tolérance 
Acceptant la solitude comme belle chance

Ne la regardant plus comme intolérable souffrance

30 octobre 2025


© Mokhtar EL AMRAOUI


Mokhtar El Amraoui (1955-aujourd'hui)
Poète d’expression française né à Mateur, en Tunisie, Mokhtar El Amraoui a enseigné la littérature et la civilisation françaises pendant plus de trois décennies, dans diverses villes de la Tunisie. Il est passionné de poésie depuis son enfance. Il a publié quatre recueils de poésie et plusieurs de ses poèmes ont été publiés sur Internet et en revues-papier.
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Solitude d'automne
Nathalie LAURO

y

Au pays des solitudes
les arbres parlent bas
le vent        vieil ami
te frôle sans te reconnaître


Les bancs vides
gardent la forme des adieux
et les feuilles          ces lettres mortes
tourbillonnent sans destinataire


On dirait que le ciel s’est retiré
dans le silence des nuages
qu’il ne reste plus
que le battement discret du monde
un souffle
une absence


Tu marches dans le crépuscule roux
les poches                       pleines de rien
le cœur en veilleuse


Les jours tombent          un à un
comme des fruits pourris
et tu t’apprends doucement
à n’attendre personne


© Nathalie LAURO

© Illustration : Aquarelle de Nathalie Lauro


Nathalie Lauro
Ecrivaine, poétesse et artiste numérique, Nathalie Lauro travaille à partir de ses photos shootings. Elle aime photographier les villes comme Berlin, Londres, Paris, Hambourg et Amsterdam mais sa spécialisation reste le sud, la Méditerranée, le soleil, les couleurs, les lumières et la Dolce Vita. Elle est par ailleurs présidente de l'association Luna Rossa.
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Seule
Michel KEUKENS

y

Dans son vieux fauteuil de cuir craquelé,
comme hier, et avant-hier, affalée,
alors que le jour est à peine levé,
là-bas on ne fait pas de grasse matinée,
Elle ne pense qu’à son petit-déjeuner.


Le café sera-t-il pour une fois plus chaud ?
Et les tartines beurrées comme il faut ?
Car tout est compté, y a jamais trop.
Ce sera de la confiture d’abricot :
le choix ne fait pas partie du lot.


Elle n’a pas beaucoup dormi dans ce lit
Revu, « médicalisé » comme on dit.
Une couverture c’est trop peu, pardi !
Réclamer n’a aucun écho ici.
Faut juste être content d’être servi.


Ses yeux voilés par les larmes rentrées,
fixent la fenêtre barricadée.
Ben oui, y a pas moyen de s’échapper
de cette chambre, refuge des âmes oubliées.
Mais, enfin, voici venir le café !


Un filet de lait, deux sucres, quel délice !
Ça réchauffe un petit peu là où ça glisse.
Une bouchée, deux bouchées, quel supplice !
Quand l’appétit n’est plus que factice.
Au diable le plateau, qu’on en finisse !


À travers la vitre, on peut voir les feuilles
d’un arbre tomber : c’est l’automne, c’est le deuil.
C’est devenu son compagnon qu’elle garde à l’œil :
à chaque jour davantage les branches s’ effeuillent.
À son image, qui pense à un cercueil.


Mais le plus dur, c’est pas l’habitude.
Morne et cruelle, en mauvais prélude.
C’est pas le cœur lourd, la lassitude.
Non plus ce ressenti d’ingratitude.
Celle qui ronge, c’est la solitude.


Son regard s’abîme à travers la vitre
Absente, immobile, elle clôt son chapitre.


Non, aujourd’hui personne ne viendra.
Elle l’a compris depuis longtemps déjà


Elle terminera son calvaire seule,
tout à côté de son bien-aimé tilleul.


© Michel KEUKENS


Michel Keukens (1948-aujourd'hui)
Né en Belgique, Michel Keukens a 75 ans et travaille toujours à titre de traducteur de brevets européens depuis plus de 30 ans, après avoir effectué une carrière partielle d'enseignant en langues germaniques (néerlandais, anglais, allemand) dans le secondaire. Il s'est toujours senti bien dans le monde de l'écriture, un parfait dérivatif qui le change radicalement de son activité éminemment technique ! En fait, il aime bien "raconter des histoires".
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« Une douce habitude... » (1)
Didier COLPIN

y

La solitude en refuge
Bien loin d’être un subterfuge
Se révèle être un abri
Qui gentiment nous sourit…


Le grand monde et sa tourmente
Dans leur agitation
D’une onde que rien n’arrête
Voudraient nous assujettir
Sans l’ombre d’un repentir
Ils vont de façon concrète
Et sans hésitation
Dans une ardeur assommante…


Savoir s’échapper du rang
Fuir son zèle récurrent
-Force de la solitude
Apaisante certitude-...

 

© Didier COLPIN
(1) Ma solitude, Georges Moustaki
Nota : écrit dans la résurgence de la fable de Jean de La Fontaine « Le Songe d'un habitant du Mogol »
« … Solitude où je trouve une douceur secrète,
Lieux que j’aimai toujours ne pourrai-je jamais,
Loin du monde et du bruit, goûter l’ombre et le frais ? ... »


Didier Colpin (1954-aujourd'hui)
Didier Colpin est né en 1954 à Laval, petite ville de l’Ouest de la France. Il a découvert l’écriture et la poésie « sur le tard », en 2010. Depuis elle est devenue sa compagne de tous les jours… La poésie est pour lui le contraire de Twitter et de sa rapidité. Elle est un arrêt sur image… Sur un émoi sur un trouble sur la Beauté sur la laideur. Le tout vu, ressenti à travers le prisme qu’est son regard où deux plus deux ne font pas toujours quatre…
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Les brumes froides
Roland MUHLMEYER

y

Les brumes froides sèment des mains ouvertes :
les écarter d’un geste d’ennui ?
Les effacer d’un silence absolu ?
Les chemins décimés fleurent aux étoiles de l’aube.
Oh, l’exil malhabile signe la défaite sanglante aux lèvres des ondines !
Est-il ce chant que perdent les sirènes au bord du gouffre ?
Est-il ce feu aux ombres vacillantes ?
Ou bien encore mes larmes abandonnées au coin d’un linceul ?


Ta voix respire un trésor d’imprévisibles lueurs.
Un murmure, souviens-t’en :
il est le souffle du vent d’autan sur tes épaules éclairées,
loin de tes yeux de myrrhe.


Les volutes de l’encens parfument les rumeurs
sur les toits rouillés de ma solitude.
Vois le phénix, renaîtra-t-il désormais au miroir du ruisseau ?
L’automne sourit,
les asters et les colchiques voguent sur un lit de rocaille,
tandis que les oies sauvages s’envolent vers les déserts des grandes lumières rouges.


© Roland MUHLMEYER


Roland Muhlmeyer
Roland Muhlmeyer est guitariste classique de formation. Il apprend le chant lyrique, deux matières qu'aujourd'hui encore il enseigne. Il se spécialise par ailleurs dans le chant grégorien, qu'il a également enseigné. Il a écrit des poèmes dans sa jeunesse qui ont paru dans quelques publications. Après un long repos poétique, il s'est remis à écrire. Il a le souci du rythme, des couleurs, des mots dans ses textes qu'il traite comme une partition de musique contemporaine.
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Solitude nue
Myriam CLOWEZ

y

Bien vite tu es parti
Rencontrant l’âme sœur
Tu étais mon petit
J’étais ton professeur.


Je me suis retrouvée
Seule dans l’appartement
Comme une veuve éplorée
J’ai pleuré mon tourment.


Il m’a fallu un an
Pour pouvoir accepter
Que mon dernier enfant
Venait de déserter.


Cette douce solitude
Je l’ai apprivoisée
Une douce habitude
S’est maintenant installée.


Elle m’a fait découvrir
En moi quelques talents
Comme celui d’écrire
Et de saisir l’instant.


© Myriam CLOWEZ


Myriam Clowez (1961-aujourd'hui)
Retraitée du secteur sanitaire et social, Myriam Clowez a toujours aimé la poésie et c'est surtout à l'adolescence qu'elle a écrit de nombreux poèmes. Aujourd'hui, elle profite de son temps libre pour participer aux concours de poésies.
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Sans domicile fixe
Pierre PAYSAC

y

Assis sur le trottoir et le dos contre un mur,
Jérémy, sans un mot, regarde les passants.
Sans but, sans espoir, et sans avenir, il dure…
Car aux âmes mal nées, la survie prend son temps.
Petits boulots, chômage ont eu raison de lui.
L’alcool comme un refuge et loyers impayés.
Famille qui éclate, part un jour sans un bruit…
Seul alors dans la rue, ne sachant où aller.
Ce soir il dormira, comme à son habitude,
Sous un pont, à l’abri, avec d’autres errants
Briser durant la nuit cette âpre solitude,
Et puis le lendemain, regarder les passants…


© Pierre PAYSAC 


Pierre Paysac (1948-aujourd'hui)
Fréquentant un atelier d'écriture depuis plus de dix ans, Pierre Paysac a publié son premier recueil, Errance, en 2021, aux éditions Persée. Son deuxième recueil est en cours d'édition. Il a par ailleurs participé au concours Poetika 2023 et l'un de ses textes a été remarqué par les membres du jury.
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L'horloge
Jean-Marc LAINELLE

y

Tic-tac, tic-tac, c’est la musique de ma journée
Après une nuit avec des insomnies répétées.
Le matin, je la regarde à l’heure des cachets
Toujours la même heure pour ne pas les oublier.


Elle est le décompte de ma vie qui s’enfuit
Lentement, mais sûrement, sans faire de bruit.
Je l’écoute parfois gémir les souvenirs du passé
Nostalgie d’un temps révolu qui est enterré.


Douze heures ont sonné, c’est l’heure du déjeuner
Avec le ragoût de la veille réchauffé sans doute.
A moins que je me prépare un plat congelé
Afin de déguster autre chose qu’un casse-croûte.


Puis, c’est l’heure des informations à la télé
Toujours la routine des images qui font pleurer.
Mais je n’ai pas vu la fin du journal télévisé
Le canapé a eu raison de moi pour rêvasser.


Et voilà le soir qui tombe, la journée se termine
C’est drôle, je ne l’ai pas vue passer, cette coquine.
L’heure de la soupe a sonné, à table pour déguster
Toujours devant la télé, compagne de mes journées.


L’horloge vient de retentir pour aller me coucher
Après cette monotonie qui agrémente mes jours.
Tic-tac, tic-tac, c’est la musique pour me bercer
Je ferme les yeux, ma nuit sera comme toujours.


Demain, l’horloge m’attendra, du moins, je l’espère.
Comme d’habitude, on échangera des mots familiers.
Ceux de la solitude de cette triste vie sans partenaire
Douleur de ce monde où nous sommes des milliers.


© Jean-Marc LAINELLE


Jean-Marc Lainelle (1951-aujourd'hui)
Né en 1951 à Haveluy, une petite commune du Nord de la France. Jean-Marc Lainelle se découvre une passion pour la poésie grâce à son travail au cœur de la forêt de Saint-Amand-les-Eaux.
Quelques petites notes en 1995 sur un calepin de bûcheron vont très vite prendre de l'ampleur et le faire devenir poète par la force des choses. Cette richesse poétique, qu’il partage autour de lui sans modération, lui vaut la reconnaissance dans de nombreux concours nationaux et internationaux de poésie. Il vient de publier son premier recueil : Poésie ma fidèle amie. En 2025, il remporte le Prix du Public au Concours
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Solitude de l'aigle
Marie-José PASCAL

y

Solitude de l'aigle sur son rocher de brume
Soleil déchirant nos cœurs mélancoliques
Chemin caillouteux aux herbes imposantes
Solitude c'est toi qui dresses
Ton front de statue figée dans le marbre des siècles
Et je me sens alors écrasée
En plein vol par cette absence chargée
De silences et d'abandons multiples,
Je me sens fétu de paille, grain de sable,
Dans l'immensité d'un monde changeant.
Solitude des murs glacés et des ombres
Où l'on se terre pour écarter le réel,
Solitude qui parcourt les saisons
Avec un arrière-goût amer, un poids
Dans la poitrine qui nous fait vaciller
Jusqu’à rejoindre de ténébreux abîmes.
Tu es pourtant l'aiguillon nécessaire
A toute création, le levain d'une pâte
Fournie qui nous réconcilie
Avec nous-mêmes et avec tous les autres.


© Marie-José PASCAL


Marie-José Pascal (1952-aujourd'hui)
Marie-José Pascal écrit depuis l'enfance. Membre de l'association Le Capital des Mots, sociétaire de L'Académie internationale L'école de La Loire, elle a été publiée dans de nombreuses revues et anthologies : Humanisme Harmonie, Florilège, l'Etrave, Traversées, revue numérique des citoyens des lettres, anthologie Flammes vives, de l'Humain pour les Migrants. Elle a reçu le Prix Charles Péguy 2020. En 2021 : le prix Hubert Fillay 2021 pour le recueil « A deux voix » co-écrit avec Alain Morinais, le prix Jules Supervielle 2021 pour le recueil « Lanterne de papier », le prix Qualité des Arts. En 2023, le Prix Paul Verlaine et 2024, le Prix Jacques Prévert.
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Solitude
Corinne DELARMOR

y
Je rêve
De bras qui se tendent
S’enroulent
M’étreignent
De mains qui se frôlent
Se serrent
Se caressent
De bouches qui se parlent
Se sourient
S’embrassent
De pas qui s’accordent
Avancent
Dansent
Ensemble

© Corinne DELARMOR


Corinne Delarmor
Juriste de formation, Corinne Delarmor a exercé en France, en Espagne et en Allemagne, avant de se consacrer à la poésie depuis 2018. Deux recueils de poèmes « Embruns » et « Nouvelle Terre » ont été publiés en novembre 2019 et avril 2021, aux Éditions Ethen, petite Maison d’Édition de province à compte d’éditeur. Ses poèmes sont régulièrement publiés dans différentes revues de poésie et elle anime des après-midis de lecture poétique dans les médiathèques, MJC, et les EHPAD…
L’inspectrice d’Académie de Créteil lui a proposé de présenter ses poèmes dans les écoles élémentaires. Membre de la Société des Poètes Français (SPF) depuis 2022, elle a publié deux recueils en 2022 et 2023, à savoir Fragments poétiques et Nurserie du poème.
Autre texte :
Comme un oiseau

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La maison aux feuilles mortes
Caroline BAUCHER

y

Dans la rue aux feuilles mortes,
Il y a une maisonnée
Aux yeux toujours fermés.
Personne ne pousse jamais la porte.
Habillée de toiles d'araignée
Et de l'oubli, la forêt
Entend encore le passé
Qui souvent résonne
Du bruit de ses sanglots.
Sous le temps qui a fui,
On peut entendre, dans la nuit,
Le murmure de ce lourd fardeau. 


L'oubli de la mémoire.
Un jour je te dirai ma douleur, 
Ce pour quoi mon âme pleure
Chaque soir 
Dans la nuit profonde
De ma mémoire,
Où les jours se confondent. 
Es-tu seulement dans le silence, 
Qui chaque matin,
M'enveloppe de son chagrin ?
Dans l'étendue bleue de la nuit qui danse, 
Je compte les étoiles que j'ai laissées filer 
Un jour tu verras, 
Je partirai loin là bas 
Loin de mes regrets 
Je serai enfin apaisée 
Un jour j'oublierai 
Ce regard figé sur ce passé. 
Un jour bientôt, tout sera fini
Et je partirai loin là-bas, dans l'oubli de ma mémoire. 

© Caroline BAUCHER


Caroline Baucher (1983-aujourd'hui)
Caroline Baucher est née en Roumanie et a été adoptée à l'âge de trois ans, sous le régime Ceaucescu. Elle se passionne pour l'écriture au décès de son grand père ; c'est pour elle un exutoire, mais également un jeu : elle a publié quatre recueils dont Vers cent nuits d'encre en 2024. Elle se passionne également pour la photo, notamment les réflexions. Elle vit actuellement à Nice. Découvrir l'un de ses derniers recueils : Te souviendras-tu ?
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Sur le fil
Sandrine DAVIN

y

Ma chair fissure
Sous l’absence
Les silences grignotent
L’hier
Les mots gercent
Les lèvres
De cette vie en barbelés
Tu ne sens pas mon odeur
Tu n’entends pas le son de ma voix
Tu ne me vois pas
Tu ne me touches pas
Tu me laisses seule ici
Tu oublies de me faire un signe
Tu gommes mon sourire
Tu me prives de toi, de nous…


© Sandrine DAVIN


Sandrine Davin (1975-aujourd'hui)
Sandrine Davin est née à Grenoble où elle vit toujours. Elle est auteure de poésie contemporaine inspirée des tankas, elle a édité une quinzaine de recueils.
Ses ouvrages sont étudiés par des classes de l’enseignement primaire et au collège où elle intervient auprès des élèves. Elle a ce goût de faire partager la poésie au jeune public et de donner l’envie d’écrire… Elle est également diplômée par la Société des poètes français pour son poème « Lettre d’un soldat ».
Autre texte :
Jardin de grand-père

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Ma solitude
Georges MOUSTAKI

y
Pour avoir si souvent dormi avec ma solitude, Je m'en suis fait presque une amie, une douce habitude. Elle ne me quitte pas d'un pas, fidèle comme une ombre. Elle m'a suivi ça et là, aux quatres coins du monde.

Non, je ne suis jamais seul avec ma solitude.

Quand elle est au creux de mon lit, elle prend toute la place, Et nous passons de longues nuits, tous les deux face à face. Je ne sais vraiment pas jusqu'où ira cette complice, Faudra-t-il que j'y prenne goût ou que je réagisse?

Non, je ne suis jamais seul avec ma solitude.

Par elle, j'ai autant appris que j'ai versé de larmes. Si parfois je la répudie, jamais elle ne désarme. Et, si je préfère l'amour d'une autre courtisane, Elle sera à mon dernier jour, ma dernière compagne.

Non, je ne suis jamais seul avec ma solitude. Non, je ne suis jamais seul avec ma solitude.

© Georges MOUSTAKI


Georges Moustaki (1934-2013)
Auteur-compositeur-interprète naturalisé français, Georges Moustaki est né en Egypte à Alexandrie. Ses parents Nessim et Sarah sont grecs et originaires de l'île de Corfou. Il passe son enfance dans un environnement multiculturel. Inscrit dans une institution française, il se passionne pour la littérature et la musique. Il rejoint Paris à l'âge de 18 ans et fréquente les cabarets. Il rencontre plusieurs artistes dont Henri Salvador et Georges Brassens. En 1958, il rencontre Edith Piaf et lui écrit son plus grand succès Milord. Il compose également pour Yves Montand, Barbara, Dalida et Serge Reggiani. En 1969, il enregistre Le Métèque qui lance sa carrière de chanteur. Infatigable voyageur, il rencontrera les grands noms de la musique brésilienne et ses compositions s'inspireront de ses voyages et des différentes cultures qu'il côtoie.Très prolifique, Georges Moustaki est l'auteur de plus d'une vingtaine d'albums et a également composé des musiques de films. Il meurt à Nice le 23 mai 2013 d'un emphysème pulmonaire. Il repose au cimetière du Père-Lachaise.
Autres textes :
Sans la nommer
Ma liberté

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La solitude
Renée BORON

y

La solitude est une amie
La tienne, la mienne aussi
Si elle s’en va, moi je m’ennuie
Alors elle s’inscrit sur mes papiers
Et se couche sur mon oreiller
Tous mes rêves sont gris
Et son sourire me fuit


Elle est là
Patiente
Elle attend
Une parole
Un geste
Et elle accourt
Apaise, comprend.


La solitude est mon amie
Ses rêves sont mes rêves
Elle ne me reproche rien
Ni la vaisselle dans l’évier
Ni les vêtements éparpillés
Ni les sourires forcés
Ni les pleurs asséchés.


Elle est là.
Patiente
Elle attend
Une parole
Et puis s’en va
Dans d’autres bras
Apaise, comprend


La solitude est mon amie
Je n’en fais pas mystère
Et si elle s’accroche à moi
Et m’aide à marcher droit
Je l’en remercie à pleurer
Et mes larmes dans l’encrier
Lui disent merci d’être là


© Renée BORON


Renée Boron (1939-aujourd'hui)
Renée Boron s'adonne à la poésie pour son plaisir et écrit aussi des nouvelles. Elle travaille la terre aux Ateliers d'Art de Château-Thierry. Elle aime également peindre et a pris quelques cours de calligraphie. Elle a ouvert une petite bibliothèque dans sa commune qui compte 83 habitants. C'est avant tout le plaisir de se rencontrer, d'échanger et... de jouer aux cartes.
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Rupture
Esther GRANEK

y

J’effacerai le temps
J’effacerai les jours
Mais je sais qu’au retour
J’irai me questionnant


Voilà
J’ai les mains vides
Vides sont mes mains
Vides
Parfois je les regarde, stupide
Et les feuilles tombent dans l’air limpide
Encore une fois


J’effacerai les places
J’effacerai les traces
Me faisant un espace
Dont tu seras absent


Encore une fois
Voilà
J’ai les mains vides
Et du creux de mes paumes arides
S’échappent fuyant entre mes doigts
Les restes d’un espoir pesant


J’effacerai les peines
J’effacerai les joies
Notre route bifurqua
Et chacun eut la sienne


Voilà j’ai les mains vides
Vides sont mes mains
Vides
Et les feuilles tombent dans l’air limpide
Encore une fois


© Esther GRANEK


Esther Granek (1927-2016)
Poétesse belgo-israélienne francophone, Esther Granek n'a pas pu suivre de scolarité du fait des lois anti-juives durant l'Occupation. Arrivée en France en 1940, elle est déportée dans le camp de Brens (Tarn) d'où elle s'échappe en 1941 pour retourner à Bruxelles. De 1943 jusqu'à la fin de l'occupation nazie, elle est cachée avec de faux papiers par une famille chrétienne à Bruxelles, qui la fait passer pour leur fille. Survivante de la Shoah, elle part vivre en Israël à partir de 1956 et travaille à l’ambassade de Belgique à Tel Aviv, comme secrétaire-comptable pendant 35 ans. Elle est également auteure-compositrice de chansons et a publié plusieurs recueils.
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La solitude
Sabine SICAUD

y

Solitude … Pour vous cela veut dire seul,
Pour moi – qui saura me comprendre ?
Cela veut dire : vert, vert dru, vivace tendre,
Vert platane, vert calycanthe, vert tilleul.


Mot vert. Silence vert. Mains vertes
De grands arbres penchés, d’arbustes fous ;
Doigts mêlés de rosiers, de lauriers, de bambous,
Pieds de cèdres âgés où se concertent
Les bêtes à Bon Dieu ; rondes alertes
De libellules sur l’eau verte…


Dans l’eau, reflets de marronniers,
D’ifs bruns, de vimes blonds, de longues menthes
Et de jeune cresson ; flaques dormantes
Et courants vifs où rament les « meuniers » ;
Rainettes à ressort et carpes vénérables ;
Martin-pêcheur… En mars, étoiles de pruniers,
De poiriers, de pommiers ; grappes d’érables.
En mai, la fête des ciguës,
Celle des boutons d’or : splendeur des prés.
Clochers blancs des yuccas, lances aiguës
Et tiges douces, chèvrefeuille aux brins serrés,
Vigne-vierge aux bras lourds chargés de palmes,
Et toujours, et partout, fraîche, luisante, calme,
L’invasion du lierre à petits flots lustrés
Gagnant le mur des cours, les carreaux des fenêtres,
Les toits des pavillons vainement retondus…
Lierre nouant au front du chêne, au cou du hêtre,
Ses bouquets de grains noirs comme un piège tendu
À la grive hésitante ; vert royaume
Des merles en habit – royaume qui s’étend
Ainsi que dans un parc de Florence ou de Rome
En nappes d’émeraude et cordages flottants…
Lierre de cette allée au porche de lumière
Dont les platanes séculaires, chaque été,
Font une longue cathédrale verte – lierre
De la grotte en rocaille où dorment abrités
Chaque hiver, les callas et les cactus fragiles ;
Housse, que la poussière blanche de la ville
Givre à peine les soirs de très grand vent – pour moi,
Vert obligé des vieilles pierres,
Des arbres vieux, des toits qui penchent, des vieux toits –


Un château ? Non, Madame, une gentilhommière,
Un ermitage vert qui sent les bois, le foin,
Où les bruits de la route arrivent d’assez loin
Pour n’être plus qu’une musique en demi-teintes.
Un train sur le talus se hâte avec des plaintes,
Mais l’horizon tout rose et mauve qu’il rejoint
Transpose le voyage en couleurs de légende.
On regarde un instant vers ces trains qui s’en vont
Traînant leur barbe grise – et c’est vrai qu’ils répandent
Un peu de nostalgie au fil de l’été blond…


Mais le jazz des moineaux fait rage dans les feuilles,
Les pigeons blancs s’exaltent, le cyprès
Est la tour enchantée où des notes s’effeuillent
Autour du rossignol. Du pré,
Monte la fièvre des grillons, des sauterelles,
Toutes les herbes ont des pattes, ont des ailes –
Et l’Âne et le Cheval 2 de la Fable sont là
Et Chantecler3 se joue en grand gala
Jour et nuit dans la cour où des plumes voltigent.


Au clair de l’eau, c’est l’éternel prodige
Du têtard de velours devenu crapaud d’or,
De la voix de cristal parmi les râpes neuves
D’innombrables grenouilles. Le chat dort.
Dickette – chien s’affaire – et sur leur tête pleuvent
Des pastilles de lune ou de soleil brûlant.
S’il pleut vraiment, la pluie à pleins seaux ruisselants
S’éparpille de même aux doigts verts qui l’arrêtent.


Un tilleul, des bambous. L’abri vert du poète,
Du vert, comprenez-vous ? Pour qu’aux vieilles maisons
Rien ne blesse les yeux sous leurs paupières lasses.
Douceur de l’arbre, de la mousse, du gazon…
Vous dites : Solitude ? Ah ! dans l’heure qui passe,
Est-il rien de vivant plus vivant qu’un jardin,
De plus mystérieux, parfumé, dru, tenace,
Et peuplé – si peuplé qu’il arrive soudain
Qu’on y discourt avec mille petits génies
Sortis l’on ne sait d’où, comme chez Aladin.


Un mot vert… Qui dira la fraîcheur infinie
D’un mot couleur de sève et de source et de l’air
Qui baigne une maison depuis toujours la vôtre,
Un mot désert peut-être et desséché pour d’autres,
Mais pour soi, familier, si proche, tendre, vert
Comme un îlot, un cher îlot dans l’univers ?…


© Sabine SICAUD
Extrait de Les poèmes de Sabine Sicaud, 1958 - Recueil posthume


Sabine Sicaud (1913-1928)
Cas unique et prodige dans les annales de la littérature française, Sabine Sicaud est une enfant douée pour la poésie et remporte dès l'âge de 11 ans plusieurs prix littéraires. Issue d'une famille d'érudits du Lot-et-Garonne, elle baigne dans un monde artistique et culturel qui éveillera en elle un don précoce pour l'écriture poétique. Son oeuvre s'achève brutalement par son décès prématuré à l'âge de 15 ans, suite à une blessure au pied qui s'envenime et la laisse dans de terribles souffrances. 
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Solitude
Myriam CLOWEZ

y

Les lumières de la ville
Sous ses yeux sont tombés
Une nuit difficile
S’annonce dans ce quartier.


Il lui faut le quitter
Et retrouver les autres
Tous ceux qui l’ont guidée
Sont un peu ses apôtres.


Être femme dans la nuit
Veut dire dormir peu
Elle ne fait pas de bruit
Et elle fait de son mieux,


Pour qu’une fois apaisée
Et l’estomac rempli
La maraude passée
Elle sombre dans l’oubli.


Il y a peu de temps
Elle était une mère
Ils ont pris ses enfants
L’ont réduite en poussières.


Les lumières de la ville
Reflètent sa misère
La faucheuse est passée
Disparue la lumière.


La mort a commencé
Sa poursuite et sa chasse
Et des requins zélés
Aujourd’hui la pourchassent.


Et un soir de janvier
Les lumières de la ville
L’ont vu agonisée
Sur sa vie difficile.


© Myriam CLOWEZ


Myriam Clowez (1961-aujourd'hui)
Retraitée du secteur sanitaire et social, Myriam Clowez a toujours aimé la poésie et c'est surtout à l'adolescence qu'elle a écrit de nombreux poèmes. Aujourd'hui, elle profite de son temps libre pour participer aux concours de poésies.
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Soupir
Sully PRUDHOMME

y

Ne jamais la voir ni l’entendre,
Ne jamais tout haut la nommer,
Mais, fidèle, toujours l’attendre,
Toujours l’aimer.


Ouvrir les bras et, las d’attendre,
Sur le néant les refermer,
Mais encor, toujours les lui tendre,
Toujours l’aimer.


Ah ! Ne pouvoir que les lui tendre,
Et dans les pleurs se consumer,
Mais ces pleurs toujours les répandre,
Toujours l’aimer.


Ne jamais la voir ni l’entendre,
Ne jamais tout haut la nommer,
Mais d’un amour toujours plus tendre
Toujours l’aimer.


© Sully PRUDHOMME
Extrait du recueil Solitudes


Sully Prudhomme (1839-1907)
Poète français, Sully Prudhomme est le premier lauréat du prix Nobel de littérature en 1901. Vite décu par son emploi d'ingénieur, il reprend ses études et se consacre au droit et à la philosophie puis décide de se vouer entièrement à la littérature. Son premier recueil, Stances et Poèmes (1865) est loué par Sainte-Beuve et lance sa carrière. Il renferme son poème le plus célèbre, Le Vase brisé, élégante métaphore du cœur brisé par un chagrin d'amour. Caractérisé par son extrême élaboration esthétique, sa poésie lui ouvre aussitôt les portes de la revue du Parnasse. L'influence de ce mouvement devient très sensible dans ses œuvres ultérieures, comme Les solitudes (1869) et plus tard Les destins (1872). Il consacra également un ouvrage poignant à son expérience de la guerre, dont il garda de graves séquelles, et publia en outre divers essais de poétique et d'esthétique. 
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François CHALAIS


La solitude est le nid des pensées.
Proverbe kurde


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