 
                    Envie de rejoindre l'anthologie virtuelle permanente ? N'hésitez pas à m'envoyer vos textes avec une mini biographie (facultatif mais conseillé !).
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                        Nota :  les textes publiés sur cette page ont fait l'objet d'une demande par courriel à leurs auteurs respectifs
                            (sauf  aux poètes disparus et certains auteurs-compositeurs-interprètes), ou bien ils sont envoyés spontanément par les auteurs publiés.                        
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                        Le Monde de Poetika
                          Site & Revue de poésie en ligne
                          N° ISSN : 2802-1797
                                    
                                    La plage étincelle, fume
                                    Et retentit, vaste enclume
                                    Que les vagues et le vent
                                    Couvrent de bruit et d'écume.
                                    Je vais, selon ma coutume,
                                    Le long du galet mouvant,
                                    Les yeux au large, rêvant
                                    Quelque rêve décevant
                                    Salé de fraîche amertume.
                                    Avec leurs doux cris joyeux
                                    Et leurs mines ingénues,
                                    De beaux enfants, jambes nues,
                                    Se mouillent à qui mieux mieux.
                                    De loin, les suit et les gronde
                                    Une vieille grand-maman.
                                    Une jeune femme blonde
                                    Lit toute seule un roman.
                                    Les légères mousselines
                                    Des nuages vagabonds
                                    Se déchirent aux collines.
                                    Les grandes vagues félines
                                    Se cabrent, puis font des bonds.
                                    Et je contemple l'abîme ;
                                    Et je voudrais, âme et corps,
                                    Me mêler aux longs accords
                                    Qui roulent de cime en cime.
© Émile BLÉMONT
 Émile Blémont
Émile Blémont
                        (1839-1927)
                        
                        
                                                {Vrai nom : Léon-Émile Petitdidier]
 
                        Poète prolifique et dramaturge occasionnel, se lie avec Victor Hugo et les poètes parnassiens ou symbolistes. En avril 1872, il fonde La Renaissance littéraire et artistique, puis il crée et dirige La Tradition, La Revue du Nord, Le Monde poétique et Le Penseur (1901). 
                         Il participe à la naissance de la Société des poètes français et fonde la Maison de poésie.
                        
                                     Une heure avant
                                    avant que de l’aube chair  d’agrume sanguinolente
                                    ne s’écoulât le jus  flamboyant du soleil
 Une heure après
                                     après que la première perle
                                     à peine née
                                     se fut gonflée prête à jaillir
                                     prête à dégouliner le long de  la plaie
                                     ouverte aux instantanés
                                     semblable aux larmes d’un  enfant
                                     inconsolable
 La nuit suivante
                                     alors que d’invisibles archers
                                     transperçaient le crépuscule
                                     les gouttes dépouillées de  leurs
                                     derniers sanglots
                                     fuirent vers la mer
                                     en d’innombrables ruisseaux
                                     en prélude
                                     aux vagues infinies
© Pierre MELENDEZ
 Pierre Melendez
Pierre Melendez
                        (1966-aujourd'hui)
                        
                        
                        Né à St-Girons en 1966, Pierre Melendez a grandi à Labrespy, Mazamet  et His.  Après Toulouse, la Normandie, La Rochelle, la Guyane  française et les Landes, Pierre vit aujourd’hui en famille à  Artagnan où il est conseiller municipal et préside l’association  culturelle du village.
 
                        Professeur-documentaliste à Vic-en-Bigorre, et après une formation d’écrivain public et  des années en tant que correspondant de presse au quotidien Sud-Ouest, il écrit  depuis toujours chansons, romans,  nouvelles mais surtout, désormais, des poésies !
                        Inspiré  par l’actualité, la vie quotidienne, les histoires d’amour  contrariées et les voyages au long cours de sa propre imagination,  c’est dans le foisonnement des images et la libre circulation des  mots que Pierre réussit à envoûter ses lecteurs.
                        Participant  régulièrement à des salons littéraires, à des lectures  poétiques, à des magazines de poésie et souvent associé à des  artistes pour la réalisation de recueils illustrés ou avec le monde  du spectacle (Théâtre des 7 Chandelles – Maubourguet), notre  auteur s’inscrit durablement dans le panel poétique contemporain. Il a publié près d'une trentaine d'ouvrages : romans, nouvelles et recueils de poésie.  
                        
                        
 Dans la maison de mes  grands-parents
                                      Les  murs suintent.
                                    Ils  pleurent
                                    Comme  je pleurais étant enfant.
                                    La  peur de vieillir peut-être
                                    La  peur de la solitude aussi
Dans  la maison de mes grands-parents
                                    Les  murs geignent
                                    Ils  se plaignent
                                    Comme  je me plaignais étant enfant
                                    La  peur de les voir partir
                                    La  peur de l’abandon aussi.
Dans  la maison de mes grands-parents
                                    Les  fenêtres se voilent
                                    Elles  se ferment
                                    Comme  se ferment leurs yeux sur la vie,
                                    La  peur de l’autre vie
                                    La  peur de ne pas avoir tout dit.
Dans  la maison de mes grands-parents
                                    Les  murs sont fragiles
                                    Ils  s’écorchent vite
                                    Comme  s’écorche mon cœur
                                    De  les voir partir
                                    De  les voir souffrir
Dans  la maison de mes grands-parents
                                    Le  grenier s’ennuie,
                                    Je  m’ennuie de lui aussi
                                    Et  je pleure comme avant,
                                    Comme  je me pleurais étant enfant
                                    Et  comme je pleure maintenant aussi.
© Renée BORON
Renée Boron (1939-aujourd'hui)
                        Renée Boron s'adonne à la poésie pour son plaisir et écrit aussi des nouvelles. Elle travaille la terre aux Ateliers d'Art de Château-Thierry. Elle aime également peindre et a pris quelques cours de calligraphie. Elle a ouvert une petite bibliothèque dans sa commune qui compte 83 habitants. C'est avant tout le plaisir de se rencontrer, d'échanger et... de jouer aux cartes.
                        
                        
La feuille des forêts
                                      Qui tourne dans la bise
                                      Là-bas, par les guérets,
                                      La feuille des forêts
                                      Qui tourne dans la bise,
                                      Va-t-elle revenir
                                    Verdir - la même tige ?
© Jean MORÉAS
 Jean Moréas
Jean Moréas
                        (1856-1910)
                        De son vrai nom d'origine grecque Ioánnis Adamántiou Papadiamantópoulos, Jean Moréas est un poète symboliste grec d'expression française, naturalisé français en 1910. Il a publié de nombreux poèmes dans des revues et magazines tels que Lutèce et Le Chat noir et a réuni ses poèmes dans deux recueils Les Syrtes et Cantilènes. Il écrit le Manifeste symboliste en 1886, qu'il publie dans le journal Le Figaro, et fonde en même temps la revue Le Symboliste avec Paul Adam et Gustave Kahn. 
                        En 1891, le symbolisme devenant plus ouvertement associé à l'anarchisme, il publie Le Pèlerin passionné qui reçoit un accueil mitigé. En 1892, il se détourne du symbolisme et fonde L'Ecole romane. Mais tout comme il s'était rapidement détourné du symbolisme après l'avoir créé, Moréas délaisse le romanisme pour le néo-classicisme. Son recueil le plus célèbre, Stances (1899), illustre cette nouvelle ambition avec plus de bonheur que les œuvres antérieures, dans une langue d'une pureté classique qui rappelle André Chénier. 
                        
Si les anges n’existent pas
                                      qui donc fait ce doux bruit
                                      par terre dans nos chambres
                                      et là-haut sur le toit ?
                                      
                                      J’entends leurs voix , j’entends leurs pas
                                      à l’heure où la nuit va descendre...
                                      Je me demande si Papa
                                      les écoute aussi parfois ?
                                      
                                      Si les anges n’existent pas,
                                      qui nous expliquera
                                      d’où viennent les cheveux de soie
                                    qui flottent le soir dans les bois ?
© Madeleine LEY 
                                    Extrait de Petites voix 
 
                        Madeleine Ley (1901-1981)
                        Femme de lettres belge, Madeleine Ley accède à la notoriété en 1930, avec la publication de son premier recueil de poésies destinées aux enfants, Petites voix, dont plusieurs seront mises en musique par divers compositeurs, dont Francis Poulenc. Entrée dans l'univers littéraire, elle côtoie notamment Colette, Charles Vildrac, André Gide et Roger Martin du Gard. Elle publie aussi des contes, nouvelles et romans. Sa santé mentale s'étant dégradée au cours de la Seconde Guerre mondiale, elle cesse définitivement d’écrire. Dès lors, son état nécessite des soins psychiatriques constants.
                        Autre texte : 
                        Odelette à l'araignée
                        
Mes bras se sont ouverts et se sont refermés,
                                    J'ai bu tous les poisons aux coupes exaltantes,
                                    Et si c'est un péché d'avoir beaucoup aimé,
                                    Je veux le premier rang parmi les pénitentes !
 Les plaisirs de la chair, se sont sur moi, posés,
                                    La lèvre m'a meurtrie et la dent m'a blessée,
                                    Je porte avec orgueil la trace des baisers,
                                    Je n'ai rien désiré que d'être caressée.
 Je ne regrette pas les beaux soirs innocents,
                                    La calme pureté des coeurs de jeunes filles,
                                    Moi qui ne peux calmer la fièvre de mon sang,
                                    Ni l'éclair de mes yeux, quand la volupté brille.
 De l'amour prodigué le long des jours passés,
                                    Des baisers pénétrants, sur les lèvres que j'aime,
                                    De ces morceaux de fleurs, entre mes doigts froissés,
                                    J'ai fait un pur collier de perles et de gemmes.
 Je porte fièrement ce mystique joyau,
                                    Dont l'éternel éclat me brûle jusqu'à l'âme ;
                                    Moi que l'amour aura marquée à mon berceau,
                                    J'entraîne vers sa loi, le cortège des femmes.
© Émilienne d'ALENÇON
                                    Extrait de Sous le masque (1918)
 Émilienne d'Alencon (1869-1945)
Émilienne d'Alencon (1869-1945)
                        Comédienne, danseuse de cabaret, célèbre courtisane et poétesse française de la Belle Époque, Émilienne d'Alençon est fille d'une concierge de la rue des Martyrs à Paris. Elle fait ses débuts dans un numéro de dresseuse de lapins au Cirque d'été en 1889, avant de devenir danseuse au Casino de Paris, aux Menus-Plaisirs, aux Folies Bergère, à la Scala puis aux Variétés. Surnommée l'une des Trois Grâces de la Belle Époque, avec Liane de Pougy et Caroline Otero, elle défraie la chronique avec ses liaisons : le duc d’Uzès, le roi des Belges Léopold II, le futur Edouard VII d’Angleterre, le Kaiser Guillaume II, Liane de Pougy, la Goulue, la poétesse Renée Vivien… Elle se fait connaître à l'international par de nombreuses photographies et cartes postales. En 1918, elle se passionne pour la littérature et écrit un recueil de poèmes Sous le masque. A la fin de la Belle Époque, elle n'est plus à la mode et ne se remet pas du décès de son mari. Elle plonge dans l'alcool et la drogue et s'endette. Elle s'installe à Nice et parvient à éponger ses dettes en vendant ses biens. Elle meurt à Monaco le 14 février 1945 et par la suit est inhumée au cimetière des Batignolles à Paris. 
                        
                                      
                                       Petite,  mince et menue au regard de charbon
                                      Grande,  blonde, élancée aux yeux d’azur tressés
                                      Brune,  veuve éplorée, enveloppée de noir
                                      Blonde  encapuchonnée d’un voile de tristesse
                                      Rousse  parcheminée de tâches orangées
                                      Elles  sont toutes belles à me voiler les yeux
                                      Je  les vois de mes mains par touches exploratrices.
Leurs  écharpes de brume sont brodées de langueur
                                      Tissées  au dur métier de leurs doigts dégourdis
                                      Éros  et les siens se damneraient pour elles
                                      Les  flèches de son arc sont en papier mâché
                                      Telle  Amphitrite elles savent oublier quelquefois
                                      Mais  d’autre fois s’entêtent à réclamer justice
                                      N’en  déplaise à Scylla maîtresse abusive.
Femmes  de haut lignage, femmes dévergondées
                                      Femmes  de bas étage, princesses de quartier
                                      Vous  êtes toutes blanches en robe de mariée
                                      Mais  tigresses méchantes aux griffes acérées
                                      Quand  le danger s’égare dans votre pré-carré.
Vous  qui êtes la mère, vous qui êtes l’amante
                                      Vous  qui êtes la sœur ou la fiancée de cœur
                                      Ne  laissez pas les dogmes enlaidir votre vie
                                      Ne  lapidaient plus les femmes adultères
                                      Aveugle,  je vous dis : « Jouissez sans merci ».
© Claude DUSSERT 
                                    
![]() Claude Dussert
Claude Dussert
                        (1947-aujourd'hui)                        
                        
Poète,  nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du  Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique  dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être  membre de nombreuses associations. Il  participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages  collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité 9 recueils de poèmes sur plus de 22 écrits, une pièce de théâtre et deux recueils de pamphlets non édités.
                        Son   dernier recueil  Par des Chemins de Traverse est libre de lecture ou   de téléchargement sur le site 'MonBestSeller.com'. Il a reçu de nombreux prix   dont 2024 : Médaillé aux Jeux Floraux de Toulouse pour le 700ème   anniversaire - Prix Jean Michel Renautour AIEL -  2ème Prix Jeux Floraux   du Béarn et en 2025 : 2ème Prix aux Jeux Floraux de Sartrouville - 3ème   Prix au Concours International de la SPAF Occitanie - Grand Prix   International du Conseil Départemental du Loir et Cher décerné par AIEL   (Académie de l'École de la Loire). Sans oublier en 2023 le Prix Spécial du Jury au concours Poetika.
                                    
                                    
                                     Oh dans les alcools d’un bar de la rive gauche
                                     Attendre attendre encor la même voyageuse
                                     Celle au baiser de feu et qui fera tourner
                                     Sa robe de cyclone autour de mes naufrages
Du côté de Shangaï ou alors dans les bruines
                                    D’un soir de Copenhague au large de l’automne
                                    Un violon de mirage emporte la mémoire
                                    Et les chambres d’hôtel ruissellent sur la mer
Quelque part dans le soir la rumeur d’une écluse
                                    Un air de blues et tournent tournent les méduses
                                    Suinte sur les trottoirs le sang des anciens crimes
                                    Et ma vie se rallume aux songes de la brume
Du côté de Shangaï de Prague ou d’Amsterdam
Odeur d’amour malade et de neige tzigane
                                    Quelque part et suivant le hasard des nuages
                                    Attendre attendre encor la même voyageuse
                                    Le cri d’un autorail me barre la mémoire.
© Christian BACHELIN
![]() Christian Bachelin (1933-2014)
Christian Bachelin (1933-2014)
                        Poète et écrivain français, Christian Bachelin s'engage à l'école militaire et ses professeurs remarquent ses dons littéraires. Adolescent, il découvre le surréalisme et rédige ses premiers poèmes. De retour à la vie civile, il reçoit en 1953 le prix Marie-Bonheur pour son recueil Stances à la neige. Pendant dix ans, il exerce une multitude de petits métiers et se remet à l'écriture en publiant plusieurs recueils. En 1973, il obtient un poste d'employé aux écritures à la Société des gens de lettres. En 1975, il décroche le prix Charles-Vildrac pour Ballade transmentale.
                        Autres textes : 
                        Il neige sur le terrain vague
                        Je suis n'importe qui
                        
                        
                                    
                                     Je la vois encore assise dans le sofa,
                                    Un rite bien  installé, sa sieste après le repas.
Une fois la  vaisselle faite au robinet de l’évier
                                    Et le bois coupé  pour recharger le foyer,
                                    Elle s’octroyait  une pause, ma foi bien méritée
                                    Avant de remettre ça  pour préparer le goûter.
Elle n’était pas  grande, le visage tout rond,
                                    Ses cheveux neigeux  dégageaient bien son front.
                                    De ses petits yeux  malicieux de couleur marron,
                                    Elle aimait la vie  et de son chat le ronron.
Tous les jours de la  semaine se succédaient pareils
                                    Affairée à ses  tâches, après un matinal réveil :
                                    Il fallait s’assurer  que tout brille nickel
                                    Pour quand les  voisines passaient donner des nouvelles.
De Paul, Jacques et  Germaine, et de leurs enfants :
                                    Les tout derniers  potins ravissaient ses tympans.
                                    Sans oublier la  cousine Berthe et ses nombreux amants.
                                    Elle écoutait,  ravie de ne rater aucun cancan.
Sa porte était  toujours ouverte : chacun disait « c’est moi ! ,
                                    Empruntait le  couloir qui menait à la cuisine tout droit,
                                    Pour prendre place  autour de la toile cirée à pois.
                                    Ça riait, se  gaussait sans malice toutefois.
L’avant de la  maison donnait sur l’entrée du stade.
                                    Le jour du match,  toutes au salon aux murs moutarde.
                                    Le jeu c’était de  de scruter les visages : « Regarde »,
                                    Disait l’une,  « ils ont gagné ! Ils ont l’humeur bavarde ! »
Le dimanche  après-midi à quinze heures tapantes,
                                    Place à la famille,  surtout aux petits-enfants.
                                    Tartes au riz et aux  abricots immanquablement,
                                    Suivies d’un jeu  de table : agréables moments !
Quand elle est  partie, la chaîne s’est cassée.
                                    Elle a laissé un  vide, celle qu’on appelait « Mamée »…
© Michel KEUKENS
Michel Keukens (1948-aujourd'hui)
                        Né en Belgique, Michel Keukens a 75 ans et travaille toujours à titre de traducteur de brevets   européens depuis plus de 30 ans, après   avoir effectué une carrière partielle d'enseignant en langues germaniques dans le   secondaire.
Les   mots croisés et l'écriture sont ses dérivatifs favoris qui le changent   radicalement de son activité professionnelle éminemment technique !
                        
Ni sa pensée, en vol vers moi par tant de lieues,
                                      Ni le rayon qui court sur son front de lumière,
                                      Ni sa beauté de jeune dieu qui la première
                                    Me tenta, ni ses yeux - ces deux caresses bleues ;
Ni son cou ni ses bras, ni rien de ce qu'on touche,
                                       Ni rien de ce qu'on voit de lui ne vaut sa bouche
                                       Où l'on meurt de plaisir et qui s'acharne à mordre,
Sa bouche de fraîcheur, de délices, de flamme,
                                     Fleur de volupté, de luxure et de désordre,
                                     Qui vous vide le cceur et vous boit jusqu'à l'âme...
© Marie NIZET
Marie Nizet (1859-1922)
                        Marie Nizet est une poétesse et femme de lettres belge. Pour son recueil Pour Axel, sa sensualité et son ardeur quasi mystique, elle est considérée comme l'une des premières poétesses modernes. Son œuvre est présente dans quelques anthologies poétiques. 
                        Après avoir publié plusieurs ouvrages (recueils, essais et nouvelles), Marie Nizet rédige Pour Axel (de Missie), dédié à son amant Cecil-Axel Veneglia. Ne souhaitant pas la publication de ces poèmes avant sa mort, elle remet le manuscrit à son amie Cécile Gilson. Georges Rency se charge de le faire publier en 1923 aux Éditions de la Vie intellectuelle. Ce recueil posthume, publié à un peu plus de mille exemplaires, se révèle audacieux et affranchi de la morale. Une telle franchise dans l'expression d'un amour sensuel est rare chez les écrivaines du XIXe siècle et rompt avec la pudeur habituelle des épanchements féminins.
                        
Le bruit du train use la nuit,
                                      La terre doucement gémit sous le voyage,
                                      Sur les visages le bruit
                                      Plaque le bleu de l’agonie.
                                      Cette rumeur,
                                      C’est le vent,
                                      Sur les chemins qui fuient l’ombre des cathédrales.
                                      Le train se roule dans la nuit
                                      Où se tait tout le blé.
                                      Et nous sommes les voyageurs :
                                      Sous les paupières de l’homme écrasé en face,
                                      Sous le pli gonflé de nos fraternités
                                      Et dans ce carrefour de nos stupidités,
                                      Cette rumeur,
                                      C’est le cri des voisinages
                                      Et des noms effacés.
                                      Le train prie en hurlant
                                      Pour ses abandonnés ;
                                      Le bruit dans sa furie,
                                      Contre toute maison,
                                    Garde ses égarés.
© Robert ANTELME
 Robert Antelme
Robert Antelme
                        (1917-1990)
                        Poète, écrivain et résistant français Robert Antelme a survécu aux camps de Buchenwald et Dachau. Il est l'auteur de plusieurs ouvrages dont un livre de référence sur les camps de concentration nazie : L'Espèce humaine paru en 1947. En 1939, il épouse Marguerite Duras, qui travaille alors pour une maison d'édition. Pendant l'Occupation, Marguerite Duras et Robert Antelme sont membres de la Résistance. Leur groupe tombe dans un guet-apens, Marguerite Duras réussit à s'échapper aidée par Jacques Morland (nom de guerre de François Mitterrand), mais Robert Antelme est arrêté et envoyé dans un camp le 1er juin 1944. A la fin de la guerre, François Miterrand retrouve Robert Antelme et organise son retour à Paris. Il fonde, en 1945, avec Marguerite Duras, une maison d'édition, “La cité universelle”. Le couple divorce mais travaille ensemble. Il milite au Parti communiste français dont il ext exclu en 1956. Immobilisé à partir de 1983 par un accident cérébro-vasculaire, Robert Antelme meurt le 26 octobre 1990.  
                        
Mon cœur bredouille en ma poitrine
                                        Comme une vieille horloge. 
                                        Où est
                                        Le clair tic-tac sonnant matines
                                      Des premiers échos ? De ton lait
O tendresse ma très humaine,
                                        Allons, me suis-je assez gavé ?
                                        Sans doute est-il temps que je freine
                                      Ma vorace perversité.
Car il est mauvais de s’étendre
                                        Sur ton corps au sable mouvant,
                                      Belle existence, cher néant.
Tu n’auras de moi que la cendre.
                                        Hélas, comme note saigneux,
                                      J’aurais voulu te donner mieux.
© Georges PERROS
 Georges Perros (1923-1978)
Georges Perros (1923-1978) 
                          Ecrivain et comédien français, il a d'abord étudié le piano et l'art dramatique avant d'entrer à la Comédie Française. Perros emploie tour à tour l'humour et la distance au quotidien, dans des aphorismes ou des développements de quelques pages, au fil d'une langue à la fois dense et dépouillée.
                          Autres textes : 
                          Il y a cent façons de mourir
                          Ainsi soit elle
                                    
                                    
                                    Je n’ai pas de frères de race,
                                    j’ai des frères de condition,
                                    des frères de fortune et d’infortune,
                                    de même fragilité, de même trouble
                                    et pareillement promis à la poussière
                                    et pareillement entêtés à servir
                                    si possible à quelque chose,
                                    à quelqu’un, même d’inconnu,
                                    à quelque frère de même portée,
                                    de même siècle, ou d’avenir…
Je n’ai pas de frères de race,
                                    ni de religion, ni de communauté,
                                    pas de frères de couleur,
                                    pas de frères de guerre ou de combat,
                                    je n’ai que des frères de Terre
                                    secoués dans la galère
                                    des espoirs et désespoirs
                                    des mortels embarqués,
                                    des frères de rêve partagés
                                    er de peurs trop communes.
Je n’ai pas de frères de race,
                                    j’ai des frères de condition,
                                    bien différents et très semblables,
                                    d’ailleurs terriblement
                                    interchangeables
                                    dans l’égoïsme
                                    ou dans la compassion…
                                    Des frères tout pétris de l’envie
                                    de partager leur solitude avec le pain
                                    et parfois le bonheur insigne
                                    d’apprendre ensemble à dire non…
Je n’ai pas de frères de race,
                                    mais des frères dans le refus
                                    de n’être qu’un passant,
                                    des frères par l’art et par le chant,
                                    et l’énergie déployée chaque jour
                                    à tenir tête au néant.
                                    Des frères à travers les âges,
                                    la géographie et les frontières,
                                    - et qui sait même, au-delà de l’espèce,
                                    peut-être un frère en tout vivant…
© Michel BAGLIN
                                    Extrait de Un présent qui s'absente, Editions Bruno Doucey, 2013
 Michel Baglin
Michel Baglin
                        (1950-2019)
                        Poète, nouvelliste, essayiste, romancier, Michel Baglin a été journaliste pendant plus de 30 ans. Il est l'auteur de plus d'une trentaine d'ouvrages publiés chez divers éditeurs. Il a également publié sous le titre Les Chants du regard un album de 40 photos deJean Dieuzaide qu’il a accompagnées de proses poétiques (éditions Privat). Parmi ses thèmes récurrents, le voyage et les faux-départs, l’univers ferroviaire, la quête du paysage, l’amour du réel malgré la difficulté à l’habiter et à être présent au monde, la recherche de l’échange avec autrui par le langage poétique, les petits bonheurs qui font la nique à la déréliction, comme « l’éclair d’un sourire dans une file d’attente ».
                        Autre texte : 
                        Emblème
                        
Je rêvais de toucher la tristesse du monde
                                      au bord désenchanté d’un étrange marais
                                      je rêvais d’une eau lourde où je retrouverais
                                    les chemins égarés de ta bouche profonde
j’ai senti dans mes mains un animal immonde
                                      échappé à la nuit d’une affreuse forêt
                                      et je vis que c’était le mal dont tu mourais
                                      que j’appelle en riant la tristesse du monde
une lumière folle un éclat de tonnerre
                                      un rire libérant ta longue nudité
                                      une immense splendeur enfin m’illuminèrent
et je vis ta douleur comme une charité
                                      rayonnant dans la nuit la longue forme claire
                                      et le cri de tombeau de ton infinité.
© Georges BATAILLE
                                    Extrait de L'Archangélique et autres poèmes, 1967
 Georges Bataille (1897-1962)
Georges Bataille (1897-1962)
                        Ecrivain, philosophe, romancier, poète, essayiste et bibliothécaire, l'oeuvre de Georges Bataille se compose d'ouvrages de littérature, mais aussi d'anthropologie, de philosophie, d'économie, de sociologie et d'histoire de l'art. À 20 ans, il se convertit au catholicisme, et envisage de devenir prêtre. Sa passion pour l'histoire l'emporte : il rejoint finalement la capitale et entre à l'Ecole nationale des chartes. 
                        Il fréquente alors les milieux artistiques et intellectuels parisiens. Il devient bibliothécaire à la Bibliothèque nationale de France. Souffrant de tuberculose, il n'exerce plus mais obtient un poste de conservateur à la bibliothèque de Carpentras. Là, il fonde une nouvelle revue avec Albert Camus et René Char. Bien que sa santé se détériore de plus en plus, il parvient à publier Le bleu du ciel dans lequel il décrit ses tendances nécrophiles, ainsi que La littérature et le mal et L'Erotisme. Après avoir été taxé de poète maudit, rejeté, violemment attaqué de son vivant, puis soutenu vers la fin de sa vie par un petit groupe d'intellectuels, Bataille est désormais un penseur reconnu dans le monde entier.  
                        
                                    
                                    
                                    
                                    Et lentement l’amoureuse
                                    Distribua ses dons :
                                    Ici son bouquet d’extases
                                    Et de souffles vainqueurs,
                                    Là son antique sagesse
                                    Et ses rumeurs d’ailes fauves.
                                    Prenez et jouissez-en tous
                                    Dans le tumulte des ans
                                    Cousus sur vos épaules frêles.
                                    Prenez et mourrez-en tous
                                    Dans le vagissement des chairs
                                    Qu’oblige la pointe vive du présent.
                                    Et lentement l’amoureuse
                                    Referma la porte lourde du tombeau,
                                    Une pierre noire sur les yeux,
                                    Une pierre blanche sur la bouche,
                                    Et dans le sommeil des sexes
                                    Enroulés sur eux mêmes
                                    La tige du sureau tendue
                                    Jusqu’à la clôture des temps.
                                    Et puis son encre précieuse,
                                    Son noir inépuisable,
                                    Comme une semence de ténèbres
                                    Dans le sillage des cieux.
© Jean-Luc ARIBAUD
                                    Extraits du recueil Là où la parole se tient posée, éditions Abordo, 2019 
 Jean-Luc
Jean-Luc
                        Aribaud
                           (1961-aujourd'hui)
                          Poète et photographe, Jean-Luc Aribaud a publié chez différents éditeurs plusieurs ouvrages à travers lesquels ces deux disciplines dialoguent et se répondent suivant des sujets d’étude qui lui sont chers, comme le sacré et le profane ou la perception du réel et de la réalité dans nos sociétés modernes. Il obtenu le prix Louis Guillaume de la poésie en prose (Editions de l’Arrière Pays) et le prix international de poésie Max-Pol Fouchet (Editions du Castor Astral).
                        
                                      
                                      
                                       Sans feu ni lieu
                                      Sans  foi ni toit
                                      Il  erre de ville en ville
                                      Sans  papier sans aveu
                                      Il  n’a pas de frontières
                                      Il  est celui qui marche
                                      Sans  jamais perdre haleine.
                                      Chemineau,  pérégrin
                                      Routard  et sans attache
                                      Parfois  trimardeur
                                      Mais  souvent philosophe
                                      Parfois  homme de rien
                                      Homme  de cœur ou de corde
                                      Ce  n’est pas un oyseux.
                                      Il  vit de tout, de rien
                                      Il  mange ce qu’il gagne
                                      Il  trime sans relâche
                                      Pour  mériter sa croûte
                                      Il  ne tend pas la main
                                      Car  elle est trop calleuse.
                                      Il  niche sous un pont
                                      Ou  à la belle étoile.
                                      Il  s’appelle François
                                      Il  écrit des poèmes
                                      Il  se nomme charlot
                                      Et  c’est le Juif errant
                                      C’est  l’homme de la Mancha
                                      Héros  de Cervantès
                                      Réfugié,  immigré,
                                      Parfois  même un peu fou
                                      C’est  un preux chevalier
                                      Gandhi  était l’un d’eux.
© Claude DUSSERT 
                                    
![]() Claude Dussert
Claude Dussert
                        (1947-aujourd'hui)                        
                        
Poète,  nouvelliste et pamphlétaire à ses heures, Claude Dussert est diplômé du  Conservatoire d’Arts Dramatiques de Grenoble. Cadre commercial, il a créé sa société de communication « CBCD » en 1993 à Lyon. Il vit actuellement en Bourgogne, dans la région de Cluny. Éclectique  dans ses lectures, sa passion pour la poésie l’a amené à être  membre de nombreuses associations. Il  participe activement à plusieurs anthologies de poésie et ouvrages  collectifs ainsi qu’à des concours. Il a édité 9 recueils de poèmes sur plus de 22 écrits, une pièce de théâtre et deux recueils de pamphlets non édités.
                        Son   dernier recueil  Par des Chemins de Traverse est libre de lecture ou   de téléchargement sur le site 'MonBestSeller.com'. Il a reçu de nombreux prix   dont 2024 : Médaillé aux Jeux Floraux de Toulouse pour le 700ème   anniversaire - Prix Jean Michel Renautour AIEL -  2ème Prix Jeux Floraux   du Béarn et en 2025 : 2ème Prix aux Jeux Floraux de Sartrouville - 3ème   Prix au Concours International de la SPAF Occitanie - Grand Prix   International du Conseil Départemental du Loir et Cher décerné par AIEL   (Académie de l'École de la Loire). Sans oublier en 2023 le Prix Spécial du Jury au concours Poetika.