Le souffle de l'automne

LES CHÂTAIGNES
de frédéric cogno


Quand l’automne ôte l’oripeau,
Quand frissonnent les louveteaux
Dans la ténébreuse forêt ;
Quand le givre aux orgelets blancs
Fige les mots des revenants
Sur quelques sentes émaciées ;
Quand le soleil en vieil archange
Bénit les fruits tombés des branches
Pour l’écureuil, le sanglier…

Les châtaignes, les châtaignes,
Les châtaignes dans la cheminée,
Les châtaignes, les châtaignes,
Les châtaignes vont nous régaler !

Ça sent bon la bûche de chêne,
Les petits chèvres des Cévennes,
Le fantôme du bourrelier ;
Je crois entendre les conteuses,
Les sabots de bois des faucheuses
Au cantou des cèpes séchés ;
La causerie au pied de l’âtre
Se réunit autour du pâtre
Qui dans la cendre a déposé…

Les châtaignes, les châtaignes,
Les châtaignes dans la cheminée,
Les châtaignes, les châtaignes,
Les châtaignes vont nous régaler !

Ces coings confits, ces bonnes mines,
Ces yeux trinquant la williamine
Ont attendu cette veillée ;
On cajole les figarettes
Qui crépitent sous les cagettes
Et dans la braise ensommeillée ;
Quel miracle cet arbre à pain,
Chacun a son cornet en main
Chauds les marrons pour la mémé…

Les châtaignes, les châtaignes,
Les châtaignes dans la cheminée,
Les châtaignes, les châtaignes,
Les châtaignes vont nous régaler !

 

 

IL AUTOMNE
de BARBARA


Il automne, à pas furtifs,
Il automne à pas feutrés,
Il automne à pas craquants
Sous un ciel pourpre et doré.
Sur les jardins dénudés
Se reflètent en transparence
Les brumes d'automne rouillées,
Rouillées
Dans la forêt de tes cheveux
Aux senteurs de poivres mêlés
Et sur nos nuits de mi-novembre,
Il automne miraculeux,
Il automne miraculeux.

Il automne, il automne des chrysanthèmes
Sur leurs deux coeurs endeuillés.
Il automne des sanglots longs
Sous un ciel gris délavé
Et, de la gare au cimetière
Où ils reviennent chaque année,
De banc de bois en banc de pierre
Et jusqu'à la dernière allée,
On les voit d'escale en escale
Qui n'en peuvent plus d'être vieux.
Sur ce chemin de leur calvaire
Qu'ils refont depuis tant des années,
Il automne désespéré,
Il automne désespéré.

Il automne, il automne,
Il automne des pommes rouges
Sur des cahiers d'écoliers.
Il automne des châtaignes
Aux poches de leur tablier.

Regarde les mésanges
En haut du grand marronnier.
Il y a des rouges-gorges
Au jardin de Batignolles
Et les enfants de novembre
Croient que sont venus du ciel
Ces petits oiseaux de plumes
Echappés d'un arc-en-ciel.
Pour les enfants de novembre
Qui ramènent, émerveillés,
Un peu de l'automne rousse
Au fond de leur tablier,
Il automne le paradis
Bien plus beau que le paradis.

Il automne, il automne
Il automne à pas furtifs,
A pas feutrés,
A pas craquants
Et, sur nos nuits de mi-novembre,
Il automne miraculeux,
Miraculeux, mon amour...

 

 

Tons d'automne
de Christian Satgé


Des nues grèges, ici havane,
Feuilles mortes, ocres et fauves,
Et marrons tout hérissonnés,
Grise mine et pas de pavanes,
Une aurore bleue, bistre et mauve,…
L’été, déjà, pique du nez !

L’automne, en robe Sienne et sombre,
Nous ramène encor’ sa mode
- Rouille ? Caramel ? Chocolat ! -
Ses branches nouées d’ombres,
Et le gave qui baguenaude
Au temps des glands, du puce, du glas.

Les ors des forêts fanées disent,
Qu’après le hâle, vient le châle,
Car l’été, vite débronzé,
À pas feutrés, par couardise,
S’enfuit, furtif, soudain tout pâle,
Au-delà des flots d’alizés.

L’automne, habillé comme un bonze,
S’ouvre en neige beige et boue brune
Sous des ciels bas, terre et tabac,
Ressort nuits noires, rousses lunes,
Buissons couleurs chamois et bronze,
L’éternel cartable à rabat…

L’été se brise en bises bises
Qui enluminent la montagne,
D’ombres mordorées, basanées.
On sent bien poindre l’heure exquise
Des noisettes dans nos campagnes
Des châtaignes, des noix glanées,…

À l’automne sous les platanes,
Les vieilles suçant cachou geignent
Sur l’avance de ces frimas.
Du café au lait aux tisanes,
Les vieux jurent cent gnons et beignes
Au « Bon Dieu » et à son climat !

 

La rentrée
de jean-luc moreau


Un oiseau chantonne
Un air de Mozart 
Que le vent d'automne 
Emporte au hasard.
Bernard et Nicole,
La main dans la main
Ont pris de l'école
Le joli chemin.
On voit sous les pommes 
Crouler les pommiers.
Les crayons, les gommes 
Sortent des plumiers.
Le ciel est morose
Il verse des pleurs...
Mais Rosa la rose
Est toujours en fleurs.

 

première plume
de frédéric cogno


Au coeur d'un nid douillet de lettres midinettes,
Quelques mots ont éclos et cousent la rosée,
Un prénom, plus hardi, s'attribue la becquée
D'un stylo imbibé d'une encre violette.

Sur la page du jour loin des carreaux de givre,
Une jolie fillette au toucher hésitant
Câline un C couffin, une lune en croissant,
Puis un L envolé de libellule libre.

Advient un E chétif, bout de peigne édenté,
Le M est magistral, deux monts, cimes marbrées ;
S'essouffle encore le E ébouriffeur d'écume.

Le N nargue Nelson route Napoléon,
On retrouve le C, caverne où âmes sont ;
Un dernier E d'Eole à l'ange rend la plume.

 

 

L'acacia
de marie-magdeleine carbet


Le vent
Passait, pleurant.
L’acacia dit :
Vent d’automne
Au front gris,
Tu t’ennuies :
Je te donne
mes feuilles.
Prends, cueille
Et va jouer au volant
Avec ton amie
La pluie.
Le printemps,
En son temps,
m’en fera de plus jolies !

 

Province
de francis carco


Les tilleuls parfumaient la blonde matinée.
Province ! Il y avait de l’herbe plein la cour
Et, quand nous descendions jouer dans le grand jour,
Nos âmes, gravement, étaient illuminées
Ô nos clairs tabliers d’enfants dans le jardin !
Cela disait, cela chantait sans le comprendre
Dans un balbutiement mystérieux et tendre
Le bonheur qui comblait nos cerveaux enfantins
L’azur tremblait au bleu reflet du toit d’ardoises
Et, quand nous rentrions, joyeux, à la maison
L’ombre avait la senteur acide des framboises
Qui mûrissaient au bas du mur frais du salon.

 

AUTOMNE
de rené-Guy CADOU


Odeur des pluies de mon enfance

Derniers soleils de la saison !

A sept ans comme il faisait bon

Après d’ennuyeuses vacances,

Se retrouver dans sa maison !

.

La vieille classe de mon père,

Pleine de guêpes écrasées,

Sentait l’encre, le bois, la craie

Et ces merveilleuses poussières

Amassées par tout un été.

.

O temps charmant des brumes douces,

Des gibiers, des longs vols d’oiseaux,

Le vent souffle sous le préau,

Mais je tiens entre paume et pouce

Une rouge pomme à couteau.

 

l'école d'autrefois
de Georges JEAN


Dans l’école d’autrefois,

Au village des merveilles,

L’odeur était sans pareille ;

Encre, craie, cire, vieux bois.

 

Je voyais le pré des sources

Et les vaches ruminant.

Le maître gardait le temps

Dans sa grosse montre rousse.

 

Nos talons sur le plancher

Faisaient un bruit de forêts ;

Nos plumes grattaient, grattaient

La neige de nos cahiers.

 

Et parfois une autre vie

Déroulait ses sortilèges

Quand on tombait dans le piège

Tendu par les poésies.

 

L'école d'antan
de claudie becques


Il est bien loin le temps des pupitres d'école...
D'un côté les garçons et de l'autre les filles,
En classe ou en récré, c'était le protocole ;
Les tabliers cachaient habits chics ou guenilles.

Je me souviens encor de l'odeur de la craie,
De la carte de France suspendue au mur...
Côte à côte on s'échangeait nos petits secrets
Penché sur son voisin dans un bruyant murmure.

Puis la règle claquait et le maître criait :
"Vous copierez cent fois : je dois me taire en cours !"
Rouge aux joues on plongeait la plume en l'encrier,
Impatients de finir l'histoire dans la cour.

Nos yeux suivaient alors la mouche sur la vitre
Dans sa danse infernale pour la liberté.
Il est bien loin le temps où l'on faisait le pitre...
Celui de l'insouciance et la fraternité.

 

L'école
de maurice carême

 

L'école était au bord du monde,
L'école était au bord du temps.
Au dedans, c'était plein de rondes ;
Au dehors, plein de pigeons blancs.
On y racontait des histoires
Si merveilleuses qu'aujourd'hui,
Dès que je commence à y croire,
Je ne sais plus bien où j'en suis.
Des fleurs y grimpaient aux fenêtres
Comme on n'en trouve nulle part,
Et, dans la cour gonflée de hêtres,
Il pleuvait de l'or en miroirs.
Sur les tableaux d'un noir profond,
Voguaient de grandes majuscules
Où, de l'aube au soir, nous glissions
Vers de nouvelles péninsules.
L'école était au bord du monde,
L'école était au bord du temps.
Ah ! que n'y suis-je encor dedans
Pour voir, au dehors, les colombes.

 

 


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Citations autour de la rentrée et de l'automne

Si l'on passait l'année entière en vacances, s'amuser serait aussi épuisant que travailler.
Shakespeare



Sonotone : Appareil auditif auquel l'homme doit avoir recours quand sonne l'automne de sa vie
Marc Escayrol



Automne. Le post-scriptum du soleil.
Pierre Véron



Celui qui ouvre une porte d'école ferme une prison.
Victor Hugo



Je ne pourrai jamais m'amuser les dimanches, car je n'arrive pas à oublier que le lendemain j'ai école.
Bill Watterson