Ecrire des vers à vingt ans, c'est avoir vingt ans.
En écrire à quarante, c'est être poète.
Francis Carco 

La fête des mères


Maman, je t'aime
Tony RICHARD


y

De la corne à la brume un navire dans l'écume.
Un nuage sur le vent l'avion défiant le temps


Nous avons voyagé sans même le décider.
Chercher un avenir pour avoir un mieux vivre.


Et puis un jour partir avant que de mourir.
Des médailles et des primes à quoi tout ça rime.


On n’a pas oublié les traces d'un passé
Qu'on nous a imposé devenir l'étranger l'être déraciné.

 

Tu as veillé nos nuits trembler pour nos sorties.
Tu as connu la guerre frôlant même la misère.


À douze ans travailler juste pour avoir le pain
Et assouvir la faim.


J'ai brûlé quelques nuits
Pour essayer l'oubli.


De différentes passions aux multiples horizons
Le panel des couleurs a la même chaleur
Lorsque s'ouvrent les cœurs.


Les liras-tu mes lignes tout là-haut dans le ciel
Maman je t'aime.


© Tony RICHARD


Tony Richard (1950-aujourd'hui)
Né à Coblence d'un père militaire et d'une mère bretonne, Tony Richard a d'abord exercé le métier de pâtissier pendant une vingtaine d'années puis a été enseignant pendant 30 ans. Une carrière bien remplie pour ce voyageur qui a sillonné la France, de Paris à Cagnes-sur-Mer en passant par Boulogne, Limoges et bien d'autres contrées. Il a également voyagé en Chine et au Japon. Ecrivain sur le tard et passionné de poésie, il a publié plusieurs recueils, à découvrir sur son blog.
Du même auteur :
Le soleil et la mer partir 
Le passé est présent 
Magique musique
Noël d'antan
Liberté je t'ai aimée 
L'amitié
Son blog : → https://pourvouslesfemmes.com/



A ma mère, image gravée près du coeur
Khal TORABULLY


Je te connais mieux sans ta présence.
La vie est aussi le désir de défiance

De la pensée et de l'entêté silence.


Je revois cette photographie de mon enfance.
J'avais cinq ans et tu me tenais la main.
Je me rappelle que quand tu m'as appelé
J'étais accroché au jamalacquier.
C'était pour ma première photo colorisée.
J'ai vite mis les fruits dans mes poches truffées.
Elles étaient surgonflées, et tu riais, tu te moquais.
Ah ce garnement accroché aux arbres fruitiers !

Nous avons marché jusqu'au petit studio
Du photographe chinois. Il m'intimidait. Il était ballot.
Il m'installa devant d'étranges rideaux.
Pour m'amuser, il faisait des gestes de judo.
Mais, rien à faire, j'étais plus que crispé.
Je croisais gauchement mes pieds.
Je cachais mal mes poches surgonflées.
Devisant avec lui, tu riais en mezzo-soprano.
"Ah ces jolis petits souliers, arrête de les coller".
Sans cesse, tu me demandais de les décroiser.
Et l'artiste me disait regarde sortir l'oiseau.
C'est un cateau vert, un petit dodo...
Il va sortir pour te prendre en photo.
Mais, moi, je pensais que tout cela était du pipeau.

"Clac, c'est dans la boîte. C'est gagné !
Maintenant, il faut la développer".

Je m'en souviens, jusqu'à aujourd'hui,
Un moment où je me suis senti scruté,
De mes poches surmontées d'un cavalier à mes souliers.
Cela t'amusait, mère, un chapardeur de fruits
Que la photo a enfin immobilisé. Tu riais à gorge déployée
Tu m'encourageais, tu étais comblée.

Tu es partie dans ce premier ciel imagé.
Mais par miracle, la photo m'est restée.
A chaque jour que le bon Dieu fait,
Je regarde cette image qui a fixé à jamais
Ton sourire solaire et cet instant privilégié.
Il m'arrive de me rappeler que je résistais
Avec mes pieds croisés et mes poches gonflées,
Une timidité fixée à jamais.

Je n'aime pas être photographié. Je dois toujours décroiser les pieds.
Je dois vider mes poches, oublier mes manguiers.
Mais te revoir avec moi sur cette photo est un testament de ta bonté.
Un éternel document de mon enfance ensoleillée.

Bonne fête à toutes les mamans du monde...


© Khal TORABULLY

Photo : Khal Torabully, enfant


Khal Torabully
Ecrivain et cinéaste mauricien, Khal Torabully est installé à Paris depuis 1976. Son œuvre est imprégnée de sa terre natale où la mer, les frontières et les imaginaires sont en relation, induisant une langue riche de multiples étagements de sons et de sens. S'inspirant des migrations des travailleurs ou laboureurs venant des Indes, Khal Torabully est le tout premier écrivain à créer une œuvre et une esthétique autour de ce concept de coolitude (dérivé moderne du mot coolie).



Maman choyait ses roses
Christian SATGÉ


Oui, maman choyait ses roses
Tout autant que ses enfants
Jusqu’à ces hivers moroses
Où le vent s’en vient buffant.

Ma maman choyait ses roses
Pour, dès qu’elle avait du temps,
Recouvrir la sinistrose
De nos jours, de tons chantants.
Du matin jusqu’au soir, notre
Maison entière enfermait
Ces parfums qui l’embaumaient.
Elle n’en eut jamais d’autre.

Oui, maman choyait ses roses
Pour les morts et les vivants.
Des fleurs, c’est bien peu de chose
Mais ça vaut des mots, souvent.

Ma maman choyait ses roses
Pour les couleurs et l’odeur.
Je la revois qui les expose,
En glisse une, avec pudeur,
Séchée, entre les deux pages
D’une lettre à des parents,
Et, parfois, les respirant
Pour se donner du courage.

Oui, maman choyait ses roses
Aussi, toujours, maintenant,
Sur sa tombe, on en dépose
Le cœur saignant, prévenants,

Car maman choyait ses roses…

 



Pour ma mère
Maurice CARÊME


Il y a plus de fleurs
Pour ma mère, en mon cœur,
Que dans tous les vergers ;

Plus de merles rieurs
Pour ma mère, en mon cœur,
Que dans le monde entier ;

Et bien plus de baisers
Pour ma mère, en mon cœur,
Qu'on en pourrait donner.



Devant deux portraits de ma mère
Emile NELLIGAN

Emilie-Amanda Hudon, mère d'Emile Nelligan


Ma mère, que je l'aime en ce portrait ancien,
Peint aux jours glorieux qu'elle était jeune fille,
Le front couleur de lys et le regard qui brille
Comme un éblouissant miroir vénitien !
Ma mère que voici n'est plus du tout la même ;
Les rides ont creusé le beau marbre frontal ;
Elle a perdu l'éclat du temps sentimental
Où son hymen chanta comme un rose poème.
Aujourd'hui je compare, et j'en suis triste aussi,
Ce front nimbé de joie et ce front de souci,
Soleil d'or, brouillard dense au couchant des années.
Mais, mystère du coeur qui ne peut s'éclairer !
Comment puis-je sourire à ces lèvres fanées !
Au portrait qui sourit, comment puis-je pleurer !


Photo : la mère de Emile Nelligan



Les mains de ma mère
Maurice CARÊME


Je prenais la main de ma mère
Pour la serrer dans les deux miennes
Comme l’on prend une lumière
Pour s’éclairer quand les nuits viennent.

Ses ongles étaient tant usés,
Sa peau quelquefois sombre et rêche.
Pourtant, je la tenais serrée
Comme on le fait sur une prêche.

Ma mère était toujours surprise
De me voir prendre ainsi sa main.
Elle me regardait, pensive
Me demandant si j’avais faim.

Et, n’osant lui dire à quel point
Je l’aimais, je la laissais
Retirer doucement sa main
Pour me verser un bol de lait.

 



Tu m'as donné le jour
Véronique AUDELON


Tu m'as donné le jour,
Tu m'as offert la vie,
Et bercée par ton amour
Se sont enfuies
Mes peurs d'enfant,
Envolées mes tristesses,
Sur ton coeur de Maman
Débordant de tendresse !

Suspendue à ton sourire,
J'ai essayé de grandir
Tout doucement,
De retenir les ans,
Et le temps qui m'a poussée
Vers l'indépendance désirée,
N'a jamais brisé le lien
Qui lie mon coeur au tien !

Tu as protégé mon enfance,
Ensoleillé mon adolescence,
Tu illumines chaque jour mon existence !

 


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