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Thème : Société


La constellation du marcheur
Thierry METZ

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Tu le découvres près de toi
Le compagnon limpide
L’oblique migrateur
Celui qui voyage et se tait
Dans la spirale du chantier
Et qu’un oiseau escorte
Le soir
V
ers les grands nuages de la lampe

De lui
Tu ne vois que sa nuque
Une parcelle foudroyée
Sur les pentes de l’outil
Une terre d’éclaircie où abonde le silex

Ici
Naître est sans limite
Pelle et pioche t’attendent sur l’autre rive

M
ais l’eau
Et ce qui passe
Comment le traverser sans traverser l’énigme ?
Destin du mangeur de pommes
Hors des campements
La parole s’expose à 
l’ortie

Et tu es là
Homme du cratère
Dans la parole incurvée
Loin de toute cité curieuse
Compagnon des tortues
Femelles du tournesol
L’écureuil nous devance
Il surgit dans la halte
Et déterre le foyer

Nuit d’étape
Celui qui chante
Nous accueille en un lieu d’endurance
Pire que la vigne
D’où lui vient cette aisance dans l’excès ?
L’épaule qui ruisselle ne cesse de battre
S’ouvre et se ferme
Disparaît parmi les chrysalides
Et nous revient
Saison
Aile repliée dans la plus proche galaxie

Que cherche-t-il
Dans la distance familière ?
Horizon

Tout se cherche

Rieur aux mâchoires peintes
Homme que tu voyais de dos
Dans la face cachée de l’arbre
Il s’échappe du prisme
Et te dévisage
Regard qui prolonge d’un jour
La caverne
Et le sentier

Va, dit-il, quitte le mûrier
Plus bas c’est le méandre
Le cerf-volant te conduire

Il nous rejoint dans l’enclume
À l’instant du vin
Et des alliages

Parois d’un feu extrême
Gisement à même le souffle
Le poème explore la roche
L’érosion du sens à midi

Et quand le soudeur est de retour
Sur le versant éclairé du repas
Son chant attire l’orage
Guetteur du monde qui éloigne les fables
Le couteau déploie ses cornes
Et la braise emporte le voyageur
Dans la lampe du terrassier.
La constellation du marcheur.

 

© Thierry METZ

 

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Thierry Metz
(1956-1997)
Né en 1956 à Paris, Thierry Metz s'installe à l'âge de 21 ans près d'Agen avec sa famille. Il partage son temps entre des travaux de manœuvre sur les chantiers qui lui permettent de gagner sa vie et des périodes de chômage durant lesquelles il écrit. Il prend contact avec le poète Jean Cussat-Blanc dont la revue Résurrection sera la première à le publier dès 1978. Poète reconnu, il obtient le prix Voronca en 1988 pour son premier recueil La table inventée publié par Jacques Brémond, et enfin par la publication du Journal d'un manœuvre chez L'Arpenteur Gallimard préfacé par le poète Jean Grosjean puis Lettres à la Bien Aimée. Ses recueils suivants seront publiés par des éditeurs indépendants. La mort accidentelle de son deuxième enfant en 1988 est un drame dont il ne se remettra jamais. Après plusieurs tentatives de sevrage alcoolique, épuisé de ne pouvoir résister aux cauchemars qui l'accablent, il se suicide le 16 avril 1997. L'homme et son œuvre ont reçu l'hommage du monde de la poésie et des éditeurs qui continuent à le publier.

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Le Monde de Poetika
Revue de poésie en ligne
N° ISSN : 2802-1797