Même la solitude
  
  
  
Même la solitude ne suffit pas pour des pleurs
                                  Puisque mille feuilles viennent vers toi pour, calmement,
                                  Démêler leur douce nostalgie, ruisselante dans la torpeur…
Ceux qui là-haut se turent, saisissent en passant
                                  Ton écoute et dès lors, accoudés, ils éludent
                                  Le sommeil que te tend ta blanche solitude.
Car toute folie est clairement dans la lumière ;
                                  Des papillons de nuit ont mis des trains de verre
                                  En branle, les confiant à la fatalité,
Qui ne connaissait ni cruches de cendre, ni tessons de bouteilles.
                                  Oui, cela rend anxieux, d’entendre se briser…
                                  Mais pourtant c’est trop clair pour que des larmes viennent.
© Paul CELAN  
                    
